05/04/2024
Min de lecture

Numéro spécial : le développement économique de Mérignac en 10 dates-clés

Mérignac est une ville champignon. Sa population passe de 7.500 habitants en 1910, c’est-à-dire bien moins qu’Arcachon (10.000), Le Bouscat (11.000) ou Bègles (14.000) à l’époque, à 75.000 aujourd’hui, pour près de 70.000 emplois. C’est le développement économique, très soutenu depuis 1910, qui tire la croissance démographique de la ville.
La lettre d’info éco vous propose cette semaine un retour sur 10 dates-clés.

"Illustrations : archives municipales" 

 

1910 : la grande semaine d’aviation

1910

La première date-clé est celle du grand meeting aérien qui se déroule du 11 au 18 septembre 1910 sur un terrain de Beaudésert. A l’époque, l’économie de la commune reste essentiellement agricole et Mérignac n’est constituée que de quelques hameaux, pour une population de 7.500 habitants. 

Le meeting est organisé par la Compagnie aérienne du Sud-Ouest et l’Aéro-Club de France sur un terrain de 200 hectares situé à l’angle du chemin de Martignac (l’actuelle avenue Marcel Dassault et de l’avenue de Beaudésert) et, surtout financé à hauteur de 250.000 francs par le mécène Adrien Verlac.

A l’époque, l’aviation n’en est qu’à ses balbutiements et reste une discipline risquée où les morts sont fréquentes. Les avions sont essentiellement construits en bois et en toile et la compétition comporte des épreuves de hauteur, de vitesse ou de distance.

Pour participer à la grande semaine, le pilote franco-péruvien Jean Biélovucic vient de Paris (Issy-lès-Moulineaux) en avion en trois jours et deux étapes (Orléans et Angoulême).

Au total, cette grande semaine, qui marque le point de départ de l’histoire aéronautique et du développement économique de Mérignac (la ville a célébré le centenaire de l’aéronautique en 2010), attire 65.000 spectateurs payants, le président de la République Armand Fallières et 4 ministres.

La Grande semaine d'aviation de Bordeaux 1910 (hydroretro.net)

 


1917 : l’hôpital américain

1917

En 1917, la population de Mérignac est de 9.000 habitants (elle progresse au total de 27% entre 1911 et 1921). Sur le plan militaire, l’année est notamment marquée par l’entrée en guerre des Etats-Unis. De fait, la région bordelaise l’arrivée en masse des soldats américains, et devient une plaque tournante, loin du front, de leur présence en France.

C’est à Mérignac que le gouvernement décide de réquisitionner un terrain de 220 hectares, situé à l’emplacement de l’aérodrome de Marcel Issartier (créé en 1912), pour y construire un hôpital militaire.

Les travaux de réalisation sont pharaoniques : les terrains sont viabilisés et électrifiés en quelques semaines, un réseau de tout-à-l’égout est mis en place, une ligne de chemin de fer est construite, 600 baraques, dont 10 unités hospitalières de 1.000 lits sont édifiées et une blanchisserie hypermoderne, qui emploie à elle-seule 200 personnes, est créée.

Au total, l’hôpital accueille 50.000 blessés jusqu’à la fin de la guerre. A leur départ, les Américains laissent 500.000 francs de dédommagement à la propriétaire du terrain.

Exposition 14/18 : les Américains à Mérignac, les hôpitaux de Beaudésert (youtube.com)

 

1936 : la création de la base aérienne de Beutre

1936
La fin des années 1930 est marquée en France par un réarmement massif. L’Armée de l’Air , puis la base aérienne de Beutre, qui devient BA 106 par la suite, sont respectivement créées en 1934 et 1936. Elle accueille dès le départ deux escadres et un centre de formation pour pilotes.

Son histoire est chargée, puisque c’est de la base aérienne que le général de Gaulle rejoint Londres le 17 juin 1940 (avant le réquisitionnement de la base par l’armée allemande le 1er juillet). Le site accueille ensuite une base de l’OTAN dans les années 1950.

Aujourd’hui la base reste, avec 150 hectares, le plus grand campus de Mérignac et l’armée demeure le premier employeur de la ville (3.000 personnes pour la BA 106 et 500 personnes pour la BA 204 à Arlac). La BA 106 accueille également deux centres de décision nationaux, la direction de la maintenance aéronautique (Dmaé) et le commandement territorial de l’armée de l’air et de l’espace (CTAAE), ce qui est unique en France.

Facebook

 

1950 : Dassault s’implante à Mérignac

1950
Dassault Aviation est aujourd’hui, avec 3.000 collaborateurs, l’entreprise la plus emblématique de la ville, son premier employeur privé, et celle dont l’effet d’entraînement économique est le plus important. Dès 1939, Marcel Bloch installe une petite usine à Talence (le principe est à l’époque d’éloigner la production militaire de la capitale). 

En 1949, Marcel Dassault (son nouveau nom depuis son retour de Buchenwald) reçoit une commande de l’Etat pour produire 450 avions (des « Flamant », des « Ouragan » et des « Vampire »). Le site de Talence, situé en cœur de ville, est trop exigu. Marcel Dassault décide de transférer les installations à Mérignac, en bordure de piste de l’aérogare. Le permis de construire du premier bâtiment de 12.000 m² est obtenu en avril 1950.

Dès octobre 1950, l’architecte Georges Hennequin conçoit un deuxième bâtiment. Il en dessine ensuite sept autres jusqu’en 1966 pour suivre les commandes, essentiellement militaires. Et depuis 70 ans, l’extension du site est quasi continue. Le campus compte aujourd’hui 28 bâtiments, sur une emprise d’une centaine d’hectares.

Les fonctions du site se sont considérablement élargies, puisqu’il assure désormais, outre l’assemblage des avions, des activités de conception, de développement technologique, d’achats, d’approvisionnements ainsi que du soutien civil et militaire. Le site assure aussi des activités de formation pour les pilotes et les techniciens. Ces activités représentent plus de 50% des 3.000 salariés du site.

Dassault Aviation, acteur majeur de l'aéronautique (dassault-aviation.com)

 

1960 : l’aéroport de Raymond Mothe

1960
Avant 1960, l’emplacement de l’actuel aéroport avait déjà accueilli des activités aéronautiques avec notamment l’aérodrome de Marcel Issartier en 1912, l’implantation de la base de Beutre (BA 106) et le « port aérien » de Bordeaux-Mérignac en 1936, qui ne sera jamais mis en service.

Au cours de la seconde guerre mondiale, les infrastructures sont successivement occupées par l’armée allemande, puis bombardées par les aviations anglaise et américaine (avec notamment 500 tonnes de bombes déversées en juin 1944), avant d’être définitivement dynamitées par les Allemands au moment de leur départ.

De fait, l’aéroport et les pistes sont totalement détruites à la Libération, avant d’être remplacées provisoirement, à partir de 1945, par une aérogare en bois. Très vite, un nouveau bâtiment est dessiné par l’architecte Raymond Mothe. Le plan-masse est validé en 1953. La première pierre est posée en 1956 et l’aéroport final (12.000 m²), qui correspond à l’actuel hall A, est inauguré en 1960.

Avec l’aérogare provisoire, le trafic passagers était passé de 25.000 à 140.000 de 1945 à 1960. Il ne cessera ensuite d’augmenter, pour atteindre son premier million en 1979, puis 6,5 millions en 2023. Quant à l’aéroport, il est devenu une porte d’entrée économique du territoire.

Aéroport de Bordeaux-Mérignac - Site Officiel

 

1978 : la rocade passe par Mérignac

1978
La rocade bordelaise est l’équipement routier le plus structurant de la métropole. Elle mesure plus de 45 kilomètres, ce qui en fait le plus long périphérique de France. Sa construction est décidée par Jacques Chaban-Delmas en 1958, pour préserver le centre de Bordeaux du trafic automobile. Elle est construite par segments pendant 26 ans de 1967 avec la mise en service du pont d’Aquitaine, à 1993, avec celle du pont François Mitterrand.

Les cinq kilomètres de Mérignac (6 échangeurs) sont construits de 1972 à 1978, date à laquelle la rocade est ouverte à la circulation. Mérignac compte 51.000 habitants à l’époque.

Sa mise en service entraîne la multiplication des zones d’activité à proximité. Selon les échangeurs, la rocade, qui dessert un total de 14 communes, voit passer entre 80.000 et 140.000 véhicules par jour. Son passage à 2X3 voies, dont les travaux commencent en 2009, s’achève à Mérignac en 2018.

Rocade Bordeaux | Circulation | Info Trafic Bordeaux | Bouchons

 


1987 : inauguration de Mérignac Soleil

1987
Dix-huit ans après l’hypermarché Carrefour, Michel Sainte-Marie inaugure le centre commercial Mérignac Soleil, réplique de Créteil Soleil (1978), qui s’étend à l’époque sur 53.000 m² de surface de plancher. Il est composé à l’ouverture de l’hypermarché Carrefour et d’une centaine de boutiques. Le centre propose également 4.000 places de parking et emploie 950 personnes.

L’opération est le fruit d’un partenariat entre Sogara, propriétaire et exploitant de l’hypermarché Carrefour, cinquième établissement de l’enseigne à l’époque, les Nouvelles Galeries, propriétaires des terrains voisins et promoteurs de l’opération, et la Ségécé (qui deviendra Klépierre), à qui les deux groupes ont confié la conception, la construction puis la commercialisation et l’animation du centre.

La Ségécé réfléchit ensuite, dès le début des années 2000, à une extension du centre.
Un premier projet est rejeté par les riverains en 2006. Un deuxième est validé en 2011 et se concrétise par une extension de 6.000 m² de surface commerciale (une trentaine de boutiques) et la réalisation de deux parkings en silo, pour un investissement total de 65 millions d’euros.

L’extension de la galerie est inaugurée en avril 2014 et le deuxième parking silo est livré en 2015. Ces travaux marquent le début de la mutation de la zone commerciale.
La fréquentation du centre est environ de 6 millions de visiteurs par an.

Merignac Soleil - Votre centre commercial à Mérignac (klepierre.fr)

 

2006 : la crise de la Sogerma et le lancement du concept de l’Aéroparc

ban_2006

Le 12 mai 2006, le conseil d’administration d’EADS réuni à Amsterdam, dont le groupe Lagardère et l’Etat sont actionnaires, annonce la fermeture de la Sogerma, très endettée et très fortement déficitaire.

Les 1.050 emplois de Mérignac doivent être supprimés et près de 4.000 emplois liés à la sous-traitance sont directement menacés.

Le « feuilleton Sogerma » dure plusieurs semaines et son retentissement est national. Le sujet est régulièrement évoqué dans les journaux télévisés et Michel Sainte-Marie, député-maire de Mérignac à l’époque, est l’invité de la matinale de Jean-Michel Apathie sur RTL le 18 mai. Dominique de Villepin, alors premier ministre, se rend à Mérignac le 23 mai. 

Le coeur du métier de la Sogerma, la maintenance aéronautique, est finalement cédé à Sabena Technics, rachetée en 2005 par le groupe TAT, qui annonce en septembre le maintien de 686 emplois sur site. Sur ces 686 emplois, 517 sont directement repris par TAT pour la maintenance civile et militaire et 171 resteront à la Sogerma (EADS), pour la fabrication de voilures.

Les autres salariés bénéficient d’un reclassement au sein du groupe ou d’un traitement social avantageux.

Sur le temps long, l’affaire Sogerma apparait comme un électro-choc qui sert d’accélérateur au renforcement de la filière aéronautique, et notamment de la maintenance en condition opérationnelle (MCO). Dès 2003, Bordeaux Technowest se recentre sur la filière, à la faveur d’un rapprochement avec le Technoparc de Saint-Laurent-du-Québec. L’association de préfiguration de l’Aéroparc est ensuite lancée en 2006. Le CSFA, puis la Simmad s’implantent ensuite dans la BA 106 en 2008, puis en 2012.

Quant au site de Sabena Technics, il emploie de nouveau 1.000 personnes environ.

Sabena technics – More than an MRO

 

2016 : Thales s’implante à Mérignac

2016
En 1975, deux usines de Thomson-CSF (rebaptisé Thales en 2000) ouvrent leurs portes dans l’agglomération bordelaise, la première au Haillan, consacrée à l’avionique générale, la seconde à Pessac, spécialisée dans les radars. Le site de Pessac, dont Thales est propriétaire, augmente sa surface d’un tiers en 2002. Pour l’anecdote, au Haillan, Thales est locataire de la banque du Qatar.

Au début des années 2010, chacun des deux sites emploie 1.000 salariés environ, mais le groupe considère que les usines sont désormais vétustes et examine la possibilité d’une réorganisation. C’est en avril 2013 que Jean-Bernard Lévy, le PDG de Thales, annonce aux salariés la décision du regroupement à Mérignac sur un terrain de 16 hectares situé en face de l’usine Dassault Aviation.

L’investissement de Thales dans ce projet est de 220 millions d’euros, le plus gros investissement privé dans l’agglomération bordelaise depuis une quarantaine d’années (Ford à Blanquefort en 1971). En parallèle, la CUB décide de construire une nouvelle voie de 1,5 km pour desservir le campus, tandis que Dassault Aviation fait construire une usine de maintenance hypermoderne pour ses avions Falcon.

En avril 2014, Michel Matthieu, PDG des activités avioniques, annonce sa décision de transférer de Meudon à Mérignac la plus grosse partie du centre de recherche et de développement, puis le siège mondial de Thales Avionique. La première pierre est posée le 10 avril 2015.

Le campus, dessiné par Jean-Philippe Le Covec, se compose de 60.000 mètres carrés de surface de plancher (9 bâtiments) réalisés en 18 mois par le promoteur toulousain GA, qui utilise la méthode BIM (building intelligence modeling).

Le campus, classé secret défense, est livré en septembre 2016 et accueille aujourd’hui près de 3.000 emplois. Thales est aujourd’hui, avec Dassault Aviation, le premier employeur privé de Mérignac.

Page d'accueil | Thales Group

 

2024 : Cockpit s’installe au cœur de l’Aeroparc

2024

La livraison du Cœur d’Aéroparc en janvier 2024 s’inscrit dans une décennie de développement économique hors norme pour Mérignac, marquée notamment par les premiers succès à l’export du Rafale, puis par l’extension du site de Dassault Aviation, l’implantation du campus de Thales, la création ou le développement des parcs d’activité de Vert Castel, d’Ecosph’air, des Ecchobloc, du 45e parallèle, de Community, du prolongement du tram jusquà l’aéroport ou de la mutation de la zone commerciale.

Sur le plan immobilier, l’ensemble réalisé par Quartus se déploie sur une parcelle de 4 hectares, située à l’angle des avenues de Beaudésert et Marcel Dassault. Il se compose de deux bâtiments principaux : le premier consiste en un hub tertiaire de 9.712 m² qui accueillera le projet Cockpit (6.500 m²), ainsi qu’un hôtel d’entreprises ; le second propose un parking silo de 256 places, réversible en bureaux.

La partie Cockpit, située au barycentre de l’écosystème aéronautique, gérée et animée par Bordeaux Technowest, accueille une soixantaine d’entreprises, parmi lesquelles des projets en incubation, des start up, des entreprises aéronautiques plus matures, mais aussi des institutions comme Aerospace Valley et plusieurs sous-traitants de rang 1 de Dassault Aviation.

Avec Cockpit, Bordeaux Technowest propose donc la plus forte concentration d’innovation industrielle de la métropole. La vocation du site, qui dispose également d’un amphithéâtre de 220 places et d’un espace de réception en rooftop, est aussi d’accueillir, d’animer et de valoriser la filière ASD du territoire. 

De fait, Cockpit n’a pas d’équivalent en France. Pour la ville, c’est un moteur pour son développement économique, un outil de rayonnement et de souveraineté industrielle. Quelques semaines après sa création, le site accueille déjà plusieurs centaines d’emplois hautement qualifiés.

Mérignac compte aujourd’hui 75.000 habitants.

Le Cockpit - Bordeaux Technowest

 

 

À savoir

Pour ne rien manquer de l'actualité économique à Mérignac : abonnez-vous à la lettre d'information économique.